L'éco-anxiété


Définitions.

L’éco-anxiété désigne l’inquiétude plus ou moins intense associée à l’exposition prolongée au conséquences directes du dérèglement climatique ou aux informations associées. Elle s’exprime par une altération négative des émotions, de l’humeur et des cognitions, susceptible d’entrainer des répercussions fonctionnelles, notamment un investissement immodéré du sujet climatique, une modification des relations interpersonnelles et une remise en question des projets et des choix de vie.
L'éco-anxiété ne se manifeste pas uniquement par de l'anxiété, mais aussi par une large gamme d'émotions, dont les principales sont la colère, de la culpabilité, de la tristesse, de la culpabilité, un sentiment d'impuissance, etc.

La solastalgie désigne le sentiment de tristesse et de perte que peuvent ressentir certains individus face à la transformation ou la destruction de l'environnement dans lequel ils vivent et qu'ils chérissent (Albrecht et al., 2007). Elle constitue davantage une expérience vécue en fonction d’un lieu, ce qui la distingue de l’éco-anxiété (Galway et al., 2019). Les événements météorologiques extrêmes, l’extraction des ressources, le changement climatique et la violence politique peuvent conduire à une dégradation et une transformation des lieux auxquels les individus sont attachés, avec des conséquences psychologiques négatives.

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L’éco-anxiété est-elle une maladie mentale ?

Rappelons que l’éco-anxiété recouvre un large panel d’émotions face à l’état de délabrement du monde, allant de l’anxiété à la colère, en passant par la tristesse, ou encore la honte et la culpabilité, pour n’en citer que quelques unes.
Précisons que les émotions sont des énergies qui nous mettent en mouvement vers la satisfaction de nos besoins fondamentaux. Ainsi, la tristesse, déclenchée par la perte, exprime un besoin de réconfort. La colère, déclenchée par les obstacles ou encore l’injustice, demande à ce qu’un changement ou une réparation opère. Enfin la peur, déclenchée par un danger, révèle notre besoin de protection.
Dès lors, et compte-tenu de la gravité des faits, les émotions ressenties face à l’urgence climatique en cours et aux perspectives d’effondrement qu’elle présage peuvent être perçues comme des réponses adaptées et saines face à un environnement qui ne l’est pas. Il est tout à fait rationnel qu’un être vivant s’inquiète de la disparition de l’environnement dans lequel il évolue et grâce auquel il survit. Il est tout à fait sensé d’avoir peur du danger que représentent les changements climatiques, d’être en colère contre l’inaction des gouvernements, ou encore d’être triste face à la dégradation du vivant.
Et si, au lieu d’être une maladie mentale, l’éco-anxiété était le signe d’une reconnaissance de notre interdépendance à l’égard du vivant ? « Nous ne défendons pas la nature, nous sommes la nature qui se défend » peut-on lire sur les banderoles des différentes marches et autres mobilisations pour le climat.
L’éco-indifférence est-elle un signe de meilleure santé mentale ? Doit-on réellement accepter la dévastation du monde sans broncher ? Qu’on se le dise : l’éco-anxieux est anxieux de devoir fonctionner dans un monde qui ne tourne pas rond. Il est anxieux de devoir fonctionner dans un monde où l’exploitation du vivant et la domination des plus faibles sont devenus la norme.
Dans une société où l’on doit s’adapter aux contraintes de son environnement pour évoluer, où l’on doit mettre de côté ses émotions pour diriger rationnellement sa pensée, où l’on doit optimiser sa santé psychique à tout prix, pathologiser la souffrance écologique consiste à remettre la responsabilité de cette souffrance entre les mains des individus qui en souffrent.
Or, c’est précisément parce que les sources des souffrances psychiques ont été renvoyées vers l’individu que le monde continue de tourner de plus en plus mal 1. Dépathologiser l’éco-anxiété, c’est admettre que la source de la difficulté ne se situe pas uniquement du côté de l’individu, mais aussi dans la société qu’il et qui le construit. Autrement dit, la pathologie doit changer de camp.
Si l’éco-anxiété n’est pas une maladie mentale, elle n’en est pas pour autant moins souffrante. Pouvoir en parler avec un professionnel de l’accompagnement peut s’avérer utile. Aussi, il est à noter que le risque d’isolement, de dépression et d’apparition de pathologies liées au stress comme les addictions est bien présent, particulièrement chez les personnes dont la base psycho-affective est déjà vulnérable.
Pour conclure, si l’éco-anxiété qui mobilise et met en mouvement est saine, celle qui paralyse et empêche l’individu de fonctionner dans sa vie de tous les jours doit être accompagnée.